Jusqu’ici on pensait que la douleur migraineuse était uniquement liée à la sensibilité de certaines artères superficielles du cerveau. Une nouvelle étude clinique menée par des chercheurs et neurochirurgiens français vient de renverser cette conception datant de 1940. Finalement, d’autres structures cérébrales, plus profondes, sont impliquées dans la sensation de douleur. Aperçu de cette découverte très prometteuse pour le développement de nouvelles thérapies anti-migraineuses.
Une étude invasive
Pour réaliser cette étude, trois neurochirurgiens ont collecté des données lors de chirurgie crâniale éveillée portant sur une 53 patients et patientes, âgés d’une quarantaine d’années en moyenne.
En stimulant certaines zones de leur cerveau par des gestes mécaniques inhérents à l’opération (toucher, pression, étirement), les chercheurs ont demandé aux patients ce qu’ils ressentaient.
Contre toutes attentes, les patients ont évoqué des sensations de douleurs vives et brèves au niveau du visage en réaction aux stimulations mécaniques.
En moyenne, 1,8 événement douloureux a été observé par patient.
En analysant l’ensemble des données récoltées lors de ces craniotomies éveillées, certaines zones cérébrales, considérées auparavant comme indolores, se sont donc révélées sensibles à la douleur.
À savoir ! Une craniotomie, ou craniectomie, est une opération chirurgicale consistant à découper un ou plusieurs os du crane pour avoir accès à l’encéphale. Cette technique est utilisée pour retirer une tumeur, stopper une hémorragie ou traiter certains types d’Accident Vasculaire Cérébral.
En stimulant la méninge nommée pie-mère, l’enveloppe profonde qui entoure le cerveau pour le protéger, et ses vaisseaux nourriciers, les chercheurs se sont aperçus que le patient ressentait des douleurs au niveau du visage et notamment du même côté que le stimulus.
La sensation douloureuse était ressentie au niveau du front, de l’orbite, de la cornée et des régions temporales et de la racine du nez.
Remise en cause de la théorie existante
La théorie admise jusqu’à aujourd’hui, et mise en évidence par des chercheurs américains, Bronson Ray et Harold Wolff en 1940, avançait que seule la dure-mère, et ses vaisseaux nourriciers, étaient sensibles à la douleur. En effet, il est admis que dans la physiopathologie de la migraine, c’est la dilatation et l’inflammation des artères de la dure-mère qui sont à l’origine de la douleur.
À savoir ! La dure-mère est une méninge, au même titre que l’arachnoïde et la pie-mère. Elles enveloppent le système nerveux central (cerveau et moelle épinière). La dure-mère est la membrane la plus externe, viennent ensuite successivement l’arachnoïde et la pie-mère. La dure-mère épaisse et fibreuse, est située juste en dessous la boite crânienne pour protéger l’encéphale comprenant le cerveau, le tronc cérébral et le cervelet. Entre l’os et la dure-mère, on distingue l’espace épidural dans lequel cheminent des d’artères et de veines. C’est dans cet espace que se pratique les anesthésies péridurales.
Avec cette nouvelle découverte et la mise en évidence de la sensibilité de la pie-mère et ses vaisseaux, plus profondément dans le système nerveux central, ce sont de nouvelles perspectives qui s’ouvrent pour les travaux de recherche visant à comprendre les mécanismes physiologiques de la migraine.
S’il existe effectivement des récepteurs d’influx douloureux au niveau de la pie-mère et de ses vaisseaux, il est facile d’imaginer le développement de nouveau traitement soignant les céphalées et notamment celles identifiées dans la migraine.
Julie P., Journaliste scientifique
– Dural and pial pain-sensitive structures in humans: new inputs from awake craniotomies. D.Fontaine et al. Academic Group. Consulté le 20 février 2018.
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