Un anticorps monoclonal pour prévenir la migraine ?

La migraine est une maladie dont l’impact sur la qualité de vie et l’activité professionnelle peut devenir invalidant, surtout en cas de crise sévère. Or, depuis la commercialisation des triptans il y a une trentaine d’années, l’arsenal thérapeutique disponible contre la migraine ne s’est malheureusement pas beaucoup enrichi. C’est sans compter l’arrivée en France d’une nouvelle spécialité antimigraineuse formulée à partir d’un anticorps monoclonal pour prévenir la migraine.

Migraine sévère et qualité de vie altérée

La migraine désigne une maladie dont l’un des symptômes est le mal de tête. Bien qu’elle touche plusieurs millions de personnes en France, cette pathologie reste encore largement sous-diagnostiquée. Elle possède pourtant des caractéristiques bien définies :

• Installation progressive de la douleur et survenue par crise
• Durée de la crise entre 4 heures et 3 jours (en l’absence de traitement)
• Douleur pulsatile modérée à sévère associée à des nausées et vomissements
• Douleur souvent unilatérale
• Intensité de la douleur augmentée par un effort physique (comme la marche)

Imprévisibles, les crises de migraine disparaissent spontanément. Elles peuvent être déclenchées par certains aliments (chocolat, café), des facteurs hormonaux, des facteurs psychologiques ou encore des facteurs liés au mode de vie (manque de sommeil, stress…). D’autres facteurs environnementaux comme des stimulations sensorielles peuvent également participer au déclenchement d’une crise de migraine (comme une lumière intense, bruit important, ou fortes chaleurs).

À savoir ! Les facteurs déclenchants de la migraine n’en constituent pas la cause. Il s’agit plutôt de facteurs environnementaux auxquels le patient migraineux se montre très sensible.

Les crises de migraine peuvent être très variables en fréquence, en intensité et en durée d’un patient migraineux à l’autre mais également chez une même personne. L’impact de la migraine sur la qualité de vie et l’activité professionnelle peut donc devenir rapidement invalidant, surtout en cas de crise sévère. Certaines personnes sujettes aux migraines sévères  peuvent en effet voir leur quotidien grandement affecté par un nombre élevé de jours de migraine (minimum 8 par mois) et l’échec de différentes solutions thérapeutiques.

La prise en charge de la migraine repose à la fois sur le traitement des crises (antalgiques et anti-inflammatoires non stéroïdiens, triptans) ainsi que sur la mise en place d’un traitement de fond prophylactique pour en réduire la fréquence. Or, l’arsenal thérapeutique disponible contre la migraine ne s’est pas beaucoup enrichi ces dernières décennies.

Dans ce contexte, une nouvelle spécialité utile dans la prévention de la survenue des crises de migraine vient d’arriver en France. Nommée EMGALITY, elle est formulée à partir d’un anticorps monoclonal.

À savoir ! Fabriqués à partir de cellules de culture sélectionnées pour une pathologie en particulier, les anticorps monoclonaux ont une cible bien précise, ce qui permet de réduire considérablement les effets indésirables des traitements médicamenteux.

Un nouvel anticorps monoclonal pour prévenir la migraine

Au cœur d’EMGALITY, un principe actif : le galcanézumab. Cet anticorps monoclonal de type IgG4 appartient à la classe des antagonistes du CGRP.

À savoir ! Le CGRP (peptide relié au gène de la calcitonine) est un puissant vasodilatateur qui élargit les vaisseaux sanguins dans le cerveau. Il est  impliqué dans la transmission de la douleur et la pathogenèse de la migraine.

En bloquant le CGRP, le galcanézumab empêche ainsi son activité vasodilatatrice à l’origine des douleurs migraineuses ainsi que l’activation de la cascade inflammatoire responsable de la crise de migraine. Plusieurs études de supériorité contre placebo ont ainsi permis de démontrer l’efficacité du galcanézumab sur différents profils cliniques de migraine (migraines épisodiques et chroniques) avec une réduction du nombre de jours de crise migraineuse par mois. Les doses testées s’élevaient à 120 mg/mois (avec dose de charge de 240 mg) et 240 mg/mois.

Seul bémol de cet anticorps monoclonal : sa tolérance. Le plus long suivi ayant été effectué sur une année seulement, les données disponibles à ce jour sont uniquement des données à court terme. Sur le long terme, des incertitudes demeurent, notamment en termes de risques cardiovasculaires (pour lesquels aucune donnée de sécurité n’est disponible) et d’immunogénicité (avec un risque de développer des anticorps anti-galcanézumab).

Vers une meilleure prévention de la survenue des migraines

En pratique, EMGALITY  est indiqué dans la prophylaxie de la migraine chez l’adulte souffrant d’au moins 4 jours de migraine par mois. Seuls les neurologues, médecins expérimentés dans le diagnostic et le traitement de la migraine, pourront prescrire cette spécialité à leurs patients.

L’administration du médicament se fait par injection sous-cutanée (au niveau de l’abdomen, de la cuisse, de l’arrière du bras ou dans le fessier) au moyen d’un stylo prérempli. La posologie recommandée étant d’une injection mensuelle de 120 mg de galcanézumab, avec une dose de charge de 240 mg à l’initiation.

À savoir ! Il sera possible pour le patient de s’administrer lui-même l’injection à la condition d’avoir été formé à l’utilisation du stylo prérempli, et avec l’accord de son médecin prescripteur.

Disponible en officine et à l’hôpital, l’anticorps monoclonal EMGALITY  semble constituer une solution thérapeutique intéressante dans la prise en charge prophylactique de la migraine, surtout pour les patients ne répondant pas aux traitements habituels.

Déborah L., Docteur en Pharmacie